La Conférence des Doyens de Médecine, le Conseil National de l’Ordre des médecins, le Conseil national des universités santé, les Conférences des Présidents de CME de CHU et des Directeurs généraux de CHU s’unissent et s’élèvent ensemble contre le palmarès « Médecins experts 2023 » publié par Le Point (édition 27 avril 2023 n° 2647). Ce classement, qui se fonde sur des informations subjectives et tronquées, porte préjudice tant aux praticiens qu’à la médecine et donc aux patients.
Une atteinte à la déontologie médicale
Le journal Le Point vient de publier ce qu’il estime être un palmarès des meilleurs médecins « experts » dans leur discipline. Cette publication, qui porte atteinte de manière grave à la déontologie médicale et risque d’induire en erreur les patients, intervient malgré de multiples mises en garde de la part du Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM), de la Conférence des Doyens de médecine, de la Conférence des directeurs généraux de CHU, de la Conférence des Présidents de CME de CHU et d’Unicancer.
Un palmarès non représentatif
La plupart des médecins cités dans ce palmarès n’ont pourtant pas répondu aux questionnaires, sur les consignes de l’Ordre des médecins et de leurs institutions représentatives. Certains experts de très grande qualité sont au contraire absents du classement car ils ont pris le temps d’exiger explicitement auprès du journal de ne pas y figurer.
Sur 1 000 médecins cités, 797 exercent en CHU (79,7 %) 126 en privé non lucratif (en particulier les Centres de Lutte Contre le Cancer) soit 12,6 %, 27 (2,7 %) en hôpitaux généraux et 49 (4,9 %) en privé lucratif, ce qui signifie que ce classement ne concerne que la médecine de recours et donc un nombre limité de patients.
Un palmarès injuste envers les médecins et les personnels non-médicaux
Le classement du Point est injuste et discriminatoire vis-à-vis des médecins experts. Il semble également mettre en doute la capacité des médecins généralistes à orienter leurs patients vers des praticiens de qualité adaptés à leur pathologie.
Les personnels paramédicaux, acteurs essentiels pour assurer la qualité de la filière des soins, sont quant à eux proprement occultés et absents du palmarès.
Enfin, la notion d’équipe médicale, au sein de laquelle ceux qui publient ne sont parfois pas les mêmes que ceux qui soignent, est tout simplement mise de côté. Pourtant, les membres d’une même équipe travaillent bien de concert !
Des critères de classement non pertinents
Les trois critères utilisés par le palmarès (« notoriété », « nombre de publications », et « score Le Point » proche du score SIGAPS pourtant décrié) sont redondants et concernent quasi exclusivement les publications médicales des médecins.
Décliner de manière globale le même paramètre en l’affublant d’intitulés différents et qualifier cette méthode « d’algorithme » est une erreur méthodologique. Dans tous les cas, il ne rend pas ce classement plus pertinent sur le plan clinique pour le patient. Pire, ces critères d’évaluation des publications ne sont en aucun cas une évaluation de la qualité de la recherche. En effet, dans les publications citées, tout est mélangé, le meilleur comme le pire, y compris les publications dans des revues considérées comme « prédatrices » !
Cette méthodologie va à l’encontre de toutes les recommandations académiques nationales et internationales qui privilégient l’évaluation qualitative de la recherche.
Un palmarès qui ne traduit pas la réalité de l’exercice du soin
Ce palmarès est celui des publications scientifiques des médecins et ne traduit donc pas la réalité de l’exercice du soin. En effet, il n’évalue que l’activité académique, c’est-à-dire un quart de la certification périodique des soignants mise en place dès cette année.
Rappelons que la certification comporte quatre catégories : la connaissance (et pas seulement sa diffusion), mais aussi et surtout la compétence professionnelle, la relation avec les patients, et la santé des soignants.
Nous désapprouvons cette entreprise dont nous pensons qu’elle est avant tout motivée par des préoccupations éloignées de celles des patients. A l’heure où de très nombreux patients demandent avant tout un accès aux soins, cette initiative est très contestable au plan éthique car elle prend le risque d’induire en erreur la population s’agissant de ce qu’elle a de plus précieux, sa santé.
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