« Déserts médicaux » : nouvelles propositions pour améliorer l’accès aux soins dans les territoires

Infonews du 14 avril 2025

La CDD est engagée dans la lutte contre les déserts médicaux.  Elle dénonce le fait que près de 6 millions de Français n’aient pas accès à un médecin traitant. Elle expose sa position et décrit les évolutions de la formation des médecins et des professionnels de santé en réponse à cette iniquité d’accès aux soins en territoire.

En urgence, la CDD propose la création d’un statut d’Assistant Territorial.

Cette proposition originale portée par les doyens, soutenue par l’ordre des médecins et deux organisations de futurs médecins (ANEMF et ISNI), peut être opérationnelle dès la fin de l’année 2025. Elle repose sur la création de postes d’assistants territoriaux pour toutes les spécialités médicales ou chirurgicales incluant la médecine générale dans les zones sous-denses identifiées par les agences régionales de santé (ARS), en exercice libéral ou en exercice salarié hospitalier.

Ces assistants pourraient exercer dès la fin de leur internat en bénéficiant d’une prime d’exercice territorial spécifique. Ils bénéficieraient au terme de leur assistanat d’avantages statutaires leur permettant un accès au secteur II régulé OPTAM (l’option pratique tarifaire maîtrisée est un accord entre les médecins conventionnés et l’Assurance maladie qui autorise des dépassements d’honoraires encadrés) et, pour ceux qui choisiraient une pratique salariée, d’une embauche au 4ème échelon de la grille des praticiens hospitaliers.

Les Facultés de Médecine proposent de former ces assistants territoriaux à la maîtrise de stage universitaire (MSU) dès le début de leur prise de fonction. Cela facilitera le déploiement rapide de l’accueil des internes et des « docteurs juniors » de toutes les spécialités dans les territoires dès le mois de mai 2026. 

La CDD rappelle ses autres propositions :

  • Pour les Internes, les doyens défendent l’attribution d’une prime à l’exercice en zone sous dense revalorisée pour tous, quelle que soit leur spécialité, en exercice libéral comme en exercice salarié. Ils rappellent que pour garder la même attractivité aux postes d’internes salariés et libéraux, ils ne sont pas favorables au principe de paiement à l’acte des internes « docteurs juniors1 ». 
  • Pour les étudiants en médecine, les Facultés de Médecine/Santé souhaitent accélérer la territorialisation de leur formation par l’augmentation du nombre de stages et d’enseignements en dehors des campus hospitalo-universitaires. En effet, la réalisation de stages en territoires pendant le cursus des études de médecine est l’un des déterminants de l’installation des jeunes médecins à l’issue de leur internat (DREES 2021, INSEE 2024).
    Cette territorialisation de l’offre de formation nécessite la création de postes d’enseignants hospitalo-universitaires territoriaux et de maîtres de stages universitaires dans toutes les spécialités. Pour maintenir le niveau et la cohérence de la formation, ces enseignants doivent rester intégrés aux équipes facultaires. 
  • Pour les Praticiens A Diplôme Hors Union Européenne (PADHUE), la CDD propose de confier aux Facultés de Médecine/Santé l’organisation et la validation du Parcours de Consolidation des Connaissances (PCC) de ceux et celles déjà présents en France depuis plusieurs années.
    Elle insiste sur la nécessité de maintenir la qualité de la formation permettant d’exercer la médecine en France.
  • Pour le Numerus Apertus, la CDD rappelle que l’augmentation du nombre d’étudiants en seconde année de médecine estdéjà amorcée depuis 2019, avec une augmentation de 18 % des effectifs entre 2020 et 2024 (rapport de la cour des comptes 2024). A la rentrée 2024, 11 500 étudiants sont inscrits en seconde année contre 9 700 en 2019.
    Cette augmentation pourra se poursuivre, si elle est organisée selon des critères définis par une Conférence nationale de santé, évaluant le nombre de médecins à former dans les dix prochaines années et les spécialités concernées. Les calculs devront tenir compte des évolutions des besoins de santé, des évolutions démographiques, des évolutions des pratiques (outils numériques, intelligence artificielle), de l’universitarisation des formations paramédicales et des politiques de santé.
  • En lien avec cette croissance du nombre d’étudiants, la CDD souligne qu’il est urgent d’augmenter les effectifs d’enseignants hospitalo-universitaires (HU) pour assurer un encadrement de qualité. Le ratio étudiants/enseignant des facultés de médecine/santé s’est considérablement dégradé depuis 30 ans.
    Entre 1996 et 2024, le nombre d’étudiants en santé a triplé. Pendant la même période, le nombre d’enseignants hospitalo-universitaires a diminué de 3 % (News Tank Education et Recherche 2025).
    Il est également nécessaire d’augmenter les effectifs de personnels de scolarité et administratifs dans les universités et des espaces universitaires mobilisables (BU, CROUS, cité universitaires, salles de cours, de TD et d’ECOS).
  • La CDD n’est pas favorable à la réintégration des étudiants de nationalité française en formation en Europe. Cette mesure va dégrader la qualité de la formation des futurs médecins en augmentant le nombre d’étudiants sans augmenter le nombre d’enseignants.
    Le niveau de formation de ces étudiants n’est pas équivalent à celui des étudiants formés en France, comme le prouvent les résultats très faibles aux examens français de fin de sixième année de médecine de 2023 et 2024 de ceux qui ont passé les épreuves.
    Dans beaucoup de cas, cette réintégration du cursus français correspond à une stratégie de contournement de la sélection par la première année d’entrée en études de santé. Leur réintégration, alors qu’ils n’ont pas été reçus en médecine initialement, est inéquitable pour les autres étudiants ayant échoué en PASS-LAS. Elle introduit en outre une sélection par l’argent, les coûts de ces études à l’étranger étant très élevés. 
  • Les Doyens souhaitent consolider la territorialisation actuelle de l’année de sélection en première année d’entrée en études de santé. En effet, 75 % des départements offrent déjà cette possibilité. Rendre obligatoire l’ouverture d’une PASS ou d’une LAS dans chaque département ne permettra pas de donner la même qualité de formation à ces étudiants issus de territoires éloignés. Elle est irréaliste sans augmentation des moyens des universités. Le déploiement d’un 1er cycle des études médicales dans chaque département est totalement irréaliste. 
  • Les Facultés de Médecine/Santé sont déjà engagées dans l’universitarisation des formations paramédicales et le déploiement des formations à la Pratique Avancée.
    Ces évolutions mises en place depuis plusieurs années permettent la montée en compétences des professionnels, le développement de la recherche paramédicale, et la promotion de l’interprofessionnalité qui contribuera de façon décisive à l’amélioration de l’accès aux soins dans le cadre de l’exercice coordonné.
    Cette évolution doit s’accélérer et nécessite l’attribution de moyens suffisants aux universités tant sur le plan structurel, administratif que pédagogique. Elle nécessite la création de postes d’enseignants-chercheurs dans les disciplines médicales et paramédicales.
  1. Le « docteur junior » s’inscrit dans la suite de la réforme du 3e cycle des Études médicale engagée en 2016. Il est un praticien en formation et en autonomie supervisée. ↩︎

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